Un hzem autour des hanches pour faire le tour des pas de danses locales tunisiennes ainsi que celles d’ailleurs

Sous un éclairage de cellule baignant la scène dans l’obscurité, lié, attaché, emprisonné, écrasé par un disque de lumière, le danseur tient de l’eau de vie et danse … il danse jusqu’à… la transe. Il crie parce que ce danseur peine, se débat tout en continuant à danser et à boire avec …rage au son de la tabla et au chant patrimonial qui part des entrailles de cheb Bechir et de l’écho de la peau de sa tabla, lui aussi écrasé par un autre disque de lumière. Déchainement, vagissement, la scène se transforme en une arène, un combat, un champ de bataille. Le rythme change, le chant s’arrête, la percussion continue seule et le danseur dénoue la corde autour de son buste et de sa taille et se munit cette fois-ci d’un autre lien qu’il attache autour des hanches : le fameux «hzam » en laine tressée. Ceinture locale que les danseurs des îles Kerkennah et ceux de Djerba ont inventé pour améliorer sans doute leur maintien et leurs mouvements. Ainsi, retenues par le hzem, les hanches, sont mises en valeur et le mouvement effectué par le danseur devient plus évident aux yeux du contemplateur. En outre ce corsage stimule le danseur et l’encourage à garder le rythme et même à l’accentuer ! (et utilise une chaise comme appui. Une autre fois, une bande d’élastique qui pend de la bouche du danseur fait office de ………………… Tout en dansant, il l’enroule une fois autour de son bras, une autre fois autour de sa cuisse.) Ensuite le chant seul s’élève telle une lumière qui éveille les consciences en narrant un amour lointain, les faits et les méfaits des hommes sur la terre de Tunisie, du passage des Espagnols, des Français puis des Américains. La chorégraphie signée R B autant que la scénographie et la mise en scène signé L B A traduisent le triste état que vit l’artiste sous nos cieux, surtout lorsqu’il s’agit du statut de danseur. Mal vu, sous estimé, ignoré, marginalisé aussi bien avant qu’après «la révolution» ! Retour à la danse avec un Rochdi qui au fil de ses déhanchements marqué par un hzam blanc, puis rouge nous explique pédagogiquement l’un après l’autre des pas de danses locales des différentes régions de la Tunisie. Leur principe reste le même au niveau du mouvement des hanches. Seuls les mouvements des membres supérieurs et les membres inférieurs changent. Ensuite tout en gardant le hzem il nous invite à un tour du monde à travers quelques pas de danses telle la danse classique menée de mains et de pieds de maître en demi-pointe par Rochdi au son des percussions de la tabla et de la voix lancinante de Cheb Bchir. En conclusion, ce spectacle entier et total nous incite à l’éveil de notre conscience autant que de nos sens. Depuis que nous voyons ce danseur aller avec constance et persévérance de création en création, nous pensons que Rochdi Belgasmi est notre danseur national. D’ailleurs lors du débat qui a suivi l’avant-première, Lassaad Ben ABDALLAH n’a pas hésité à dire qu’après Laghbabi, il y a sans doute Rochdi.

Amel Bo
01-01-2015