La danse des corps et des âmes

Sur le battement d’un tambour lointain et de l’hennissement d’un cheval galopant commence l’histoire.
L’histoire de la danse folklorique tunisienne telle qu’imaginée par l’artiste Malek Sebai dans le spectacle « Khira w Rochdi » présenté récemment à l’ancienne bibliothèque nationale dans le cadre de la manifestation Dream City. Pas maladroits, puis mouvements, puis doute, puis recherche, puis figures de base, puis frémissement des corps, puis colère, puis réconciliation, puis chorégraphie. Peu à peu ou plutôt pas à pas, Malek Sebai reconstitue avec beaucoup d’amour, la genèse de la danse traditionnelle tunisienne avec la complicité du danseur Rochdi Belgasmi, de la danseuse Khira Oubeidallah -qui a commencé sa carrière de danseuse en 1962 avec la troupe nationale des arts populaires- et du percussionniste Wissem Mzoughi. Et c’est avec subtilité que nous, spectateurs, glissons dans ce qu’appelle Malek Sebai « une déclinaison possible du traditionnel tunisien ». Rochdi retrace, en solo d’abord, ce cheminement corporel à la recherche de quelque chose de « beau ». En jupe bleu royal et sur les rythmes d’Ismail Hattab, il esquisse les mouvements premiers de ce que sera la danse folklorique avant d’être rejoint par Khira, cette femme dont le corps raconte le souvenir. A deux, ils créent une symbiose artistique agréable à voir et à sentir. Rochdi w Khira ne dansaient pas uniquement, leurs corps exprimaient aussi l’envie de bouger et de danser tunisien. Dans « Khira w Rochdi », Malek Sebai reconstruit non seulement « l’histoire » de la danse folklorique tunisienne mais transmet surtout son amour pour la danse. Cet acte culturel qui raconte des pans de nous et de notre histoire. La chorégraphe se prête même à une danse commune devant le miroir qui ornait la scène du spectacle, miroir qui a reflété le plaisir qu’avait toute la troupe à être là et à partager la passion de la danse. Le spectacle se termine par une invitation du public à la danse, et c’est avec générosité et amour que Khira donne le ton en esquissant des pas basiques au son d’un battement rythmé de tambour pour entrainer la présence dans le monde de la danse folklorique tunisienne avec ses codes bien spécifiques.

Chiraz Ben M’rad
06-10-2012